Il faut décider, concevoir, proposer, réunir les talents, créer, dessiner, assembler, coordonner, animer, trouver les meilleurs réponses techniques, rassurer, superviser, gérer puis enfin livrer… C’est à moi de “donner le La”, de définir le cahier des charges pour ensuite le respecter dans sa réalisation.
Mon rôle de designer graphique consiste à créer une image dédiée et à la valoriser en poussant le plus loin possible ma capacité créative. Un concept de campagne à créer et décliner tout en respectant une identité en place, ou un exercice de style purement graphique donnant une identité propre à un document, rien n’est établi. Chaque travail est unique car issu d’un contexte particulier, d’une demande singulière.
Observations sur les technologies agricoles
Ce livre est issu d'un travail collectif d'un groupe d'écriture réuni autour de l'Atelier paysan. Dans le prolongement du manifeste déjà paru “ Reprendre la terre aux machines”, il dresse un constat dur et cru sur les ravages de l'agromachinisme et de l'industrialisation dans le monde paysan.
Ce travail a été très particulier pour moi, car il s'est déroulé sur une période très courte, avec une échéance de livraison des livres imprimés à un peu plus d'un mois et demie entre la transmission des éléments et la livraison finale programmée lors d'un événement de présentation important. La richesse et la diversité des données fournies m'ont obligé à une stricte discipline dans le traitement graphique de chaque page en mettant en place une charte éditoriale couvrant la grille de lecture, les nombreux tableaux et graphes, la gestion iconographique, le traitement des encadrés et zooms, etc.
Le livre, une fois fini, fait 140 pages, très richement illustrées et comportant de nombreuses annexes, notes de renvoi et index. Grâce à la collaboration étroite et intense établie entre l'Atelier paysan et moi, il a été édité dans les temps et très chaleureusement accueilli par le public à qui il a été présenté.
––––
Catalogues des papiers Canson
Édité par FORMAT éditions Courcoux, l’objet (le catalogue fait 190 pages et expose 3800 références) se doit d’abord d’être attractif, important, esthétique. Canson s’adresse aux esthètes, à des personnes qui utilisent le papier comme support de création. Il faut marquer les esprits par une tonalité, une idée nouvelle tous les ans, tout en respectant une “mécanique” en place”.
Cette mécanique elle-même obéit à des règles proches de celles utilisées pour la recherche ergonomique. À partir de nos conseils, Étienne Courcoux et moi-même, les gammes ont été réorganisées selon des grandes typologies d’utilisateurs. On a créé ainsi 4 “familles” : Beaux-arts, Loisirs, Scolaire puis Numérique & Technique. L’organisation se fait donc par usage (l’artiste sur le papier Arches par exemple) que par mode de fabrication ou nature de papier (papier à dessin, calques, cartons…) comme auparavant.
Bien au delà de la forme générale du “contenant” catalogue, j’ai pu pousser très loin mon travail graphique en concevant un ouvrage organisé autour d’une grille de lecture complexe mais claire, de tableaux méticuleusement élaborés, de pages illustrées par des photos totalement dédiées (détermination des sujets et direction artistique, répartition iconographique, etc.). L'organisation du chantier a été en soi un challenge passionnant. Nous nous sommes réparti les tâches ainsi : Format, en relation avec le client collectait et organisait les infos avant de les transmettre, planifiait l'ensemble du travail, validait mon travail, corrigeait, faisait valider par Canson puis fabriquait. Pour ma part, j'ai participé à la conception, assuré la création graphique, supervisé les prises de vue, réalisé l'ensemble du montage à partir des données traitées et transmises par Format. J'ai pu ainsi pousser assez loin les possibilités de mon Mac et d'Indesign en jonglant avec les feuilles de styles imbriquées, les tags d'indexation et autres fonctions complexes.
––––
Je m'appelle AFTAM, j'ai 50 ans
Stéphane Hessel a fondé cette association en 1962 dans le but de favoriser l’insertion des travailleurs migrants. C’est aujourd’hui une “grosse structure” disposant de plusieurs centres d’accueil dans toute la France, dont la vocation s’est élargie aux demandeurs d’asile, aux personnes en situation de rupture sociale, aux familles en détresse, aux exclus. Brigitte Sarazin et Bénédicte Magne travaillaient depuis quelques temps déjà pour l’AFTAM, à la collecte de témoignages en vue de créer un ouvrage pour commémorer les 50 ans de l’association. Elles m’ont sollicité et j’ai rejoint l’équipe.
J’ai découvert une matière première très riche en humanité et en sensibilité. Des textes en cours de rédaction mais déjà bien orientés pour constituer un livre. J’ai aussi découvert une absence totale d’iconographie, puis compensé ce manque en créant un univers graphique chatoyant. Je suis parti sur une idée de “strates toniques” pour figurer la compilation des âges que constitue un anniversaire. Ces strates forment une construction utilisant une gamme de couleurs très chaudes. Le but pour moi était de faire la démonstration que l’AFTAM, tout en ayant 50 ans, reste très juvénile, très active et tonique. Pour construire une iconographie d’accompagnement homogène, j’ai eu l’idée de demander à tous les interviewés de nous fournir des photos d’eux, quelle que soient la qualité ou la résolution, pour “croquer” au pinceau des séries de portraits. Le coté “maladroit” assumé de ces images participe à l’effet de fraicheur souhaité. Les personnes croquées se sont senties valorisées par ce traitement graphique et l’accueil qui a été fait au moment de la présentation au public du livre lors de l’événement des 50 ans a été extrêmement chaleureux.
Nous avons aussi soigneusement sélectionné l’imprimeur qui nous permette de mener à bien une réalisation souhaitée qualitative (FOT à Mezieu près de Lyon). Le choix du papier (Fredigoni 330g offset en couverture, puis Condat Mat 150 g pour l’intérieur) a été minutieusement étudié. Au final, un livre album en dos carré-collé avec rabats très soyeux avec une belle continuité de couleurs entre l’offset de la couverture et le couché mat de l’intérieur. Le graphisme du livre a servi de base à l’habillage de la journée d’anniversaire qui s’est tenue aux Docks de Paris, à Saint Denis en présence d’environ 2000 personnes en février 2012. Le livre lui-même a été dévoilé à cette occasion. J’ai décliné ce look sur des cartons d’invitation, bannières, badges, menus, sacs et signalétiques.
––––
Le guide de l'autoconstruction
Au départ, une masse de connaissances accumulées au fil des années par l’association Adabio Autoconstruction sur les outils pour le maraîchage biologique et la manière de les construire. La volonté ensuite, par les membres de cette association de rendre disponibles ces connaissances auprès des agriculteurs bio pour qu’ils se réapproprient leurs moyens de production.
Je me suis tout d’abord confronté à une masse d’informations très volumineuse et hétérogène. Pas de photos, pas de discours rédigé, nombre de schémas techniques bruts issus de logiciels CAO. J’ai proposé une organisation éditoriale marquée, introduite d’abord par un discours, très politique (avec éditorial de Pierre Rabhi), puis une partie sur les méthodes, pour conclure ensuite sur la partie des tutoriels sous forme de plans de montage. À mon initiative, nous avons organisé une séance photo (3 photographes : 2 membres de l’association et moi-même) d’une journée en atelier pendant une cession de formation, puis j’ai travaillé l’ensemble des plans et schémas en les homogénéisant graphiquement au look décidé pour la maquette de l’ouvrage. Les échanges ont été constants, amicaux et intenses avec Fabrice Clerc et l’équipe d’Adabio jusqu’à éditer ce guide de 250 pages au format généreux de 31 x 21 cm. J’ai eu une approche sur le design assez radicale en composant un cahier à spirale géant constitué de “fiches”, dont certaines “déroulables” en double-pages, le tout assemblé en “boîte” enveloppé d’une couverture tournante. L’objet tout entier, assez volumineux, est organisé de façon à rappeler son caractère “utilitaire”. Les choix graphiques d’utilisation d’images en pleine page, de blancs tournants amples contrastent volontairement avec cette approche utilitaire, conférant à cet ouvrage un caractère original et bien marqué, plus proche de “l’objet” que du livre.
––––
Campagne “Time to Anticipate”.
Grenoble Ecole de Management a commencé à prendre conscience que son positionnement d’outsider, de “petite parmi les grandes écoles” commençait à s’essouffler. Son antériorité, sa taille et surtout son classement la hissait de plus en plus au niveau des plus grandes. Tout en cherchant à rester décalé”, j’ai réfléchi avec eux à un concept permettant de communiquer sur la capacité de projection de l’école vers l’avenir, d’ancrage dans le temps. J’ai eu l’idée de me servir de la science fiction, mais en créant un contre-pied puissant de vision à partir du passé. On appelle ça maintenant le “rétro-futurisme”. En utilisant les codes “vintage” de la SF américaine des années 30 à 50, j’ai créé un univers de postures exagérées, outrancières et “has been maîtrisées” en créant et en posant l’injonction “Time to anticipate” comme un titre de film rétro. J’ai usé et abusé de tous les codes du genre pour créer un univers inspiré des revues comme “Amazing Stories”, “Weird Science”, “Flash Gordon”, des premiers Blake and Mortimer et des films “Nanard” de Ed Wood dans les années 50, des bandes son à base de scies musicales ou d’humour décalé et rock’n roll des B52’s…
Des costumes, coupes de cheveux aux postures, des cadrans du tableau de bord se rapprochant plus de la plomberie que de l’électricité, de la typographie “surdramatisante”, tout a été posé pour que “l’Ecole du management de la technologie et de l’innovation” se joue de sa propre image en contrepoint absolu de sa vocation. J’ai fait appel à Jérôme Guerry, un peintre, pour trouver avec lui le traitement graphique le plus approchant des affiches de cinéma des années 30 à 50. Avec lui, j’ai pu définir une “texture” graphique propre à cette campagne. Cette dernière s’est déclinée pendant deux ans sur tous les supports de communication de l’Ecole.
––––
Communication corporate d’Insight Outside
J'ai accompagné cette agence événementielle dans sa communication pendant quelques années. Insight Outside, c'est une équipe dynamique, proactive et innovante, super professionnelle et très organisée. L’idée pour moi consiste à faire passer image d’une mécanique bien rodée pour illustrer la “maîtrise de process” afin de mettre en scène le participant de l’événement. La mécanique, c’est le pivot autour duquel s’articulent toutes les compétences, toutes les énergies de la société, tant internes qu’externes pour que le participant “vive” l’événement au plus près. Le message est rationnel, très rationnel, même. Mais il est porté par un design tonique et en mouvement (asymétrie, déséquilibre contrôlé).
Pour des questions de droit à l’image, et pour éviter de piocher dans les banques d’images des clichés stéréotypés, j’ai eu l’idée de faire organiser par Insight Outside un événement dans un studio photo, avec le consentement de tous les invités participants. Nous avons pu, avec deux photographes (Évelyne Garat et Arnaud Childéric), constituer ainsi une “photothèque événementielle” assez considérable et complètement dédiée, et surtout, ça a été l’occasion pour tout Insight outside et ses proches, de vraiment “vivre l’événement”. La mécanique graphique obtenue se décline de la brochure institutionnelle et produits au site Web, en passant par un système d’auto-édition de devis volumineux et complexes.
––––
Propos croisés
La Chambre de Commerce et d’Industrie de Grenoble avait fait réaliser une suite d’interviews par un journaliste auprès de différentes personnalités locales. Son président a eu l’idée de compiler ces interviews pour créer un ouvrage destiné à marquer les 150 ans de la CCI. J’ai été sollicité environ six mois avant la date d’échéance définie, à savoir la tenue de l’assemblée générale en juin 2014. Découvrant que les textes étaient, soit obsolètes (les personnes citées ayant changé de statut depuis leur interview), soit pas du tout rédigés en vue de construire un livre, j’ai proposé de tout remettre à plat en constituant une équipe avec Bénédicte Magne (rédactrice et éditrice - Atout' Mots). Nous avons alors façonné un ouvrage s’appuyant sur l’histoire de la CCI parsemée “d’interventions” des différents acteurs accompagnant l’institution.
Construit en trois grandes parties hier, aujourd’hui et demain, le livre est parsemé de “haltes”, sortes de cairns sémantique constitués de propos croisés servant de repères tout au long de l’ouvrage. Nous sommes allés chercher l’information auprès des acteurs du moment (le nouveau Maire de Grenoble, le nouveau Président de la Metro, le président de la CCI Rhône-Alpes) en organisant les interviews, en collectant auprès des musées l’information historique et l’iconographie (totalement inexistante jusqu’alors), en prenant moi-même des photos sur des sujets contemporains à illustrer. En constituant un pool resserré avec Bernard Aubert, le directeur général de la CCI, nous avons défini, écrit et illustré l’ensemble de l’ouvrage de 120 pages. J’ai totalement organisé la production en aidant à la rédaction d’un appel d’offre dédié à ce livre, aidé au choix du prestataire, puis suivi jusqu’à la livraison sa fabrication. Propos croisés a été présenté lors d’une cérémonie publique pour commémorer les 150 ans de la CCI, en présence de nombreux responsables économiques et politiques le jour de l’AG, en date prévue.
––––
Campagnes de collecte de la taxe d'apprentissage de GEM
Pendant plusieurs années, chaque campagne de collecte de la taxe d’apprentissage de Grenoble École de Management a fait l’objet d’une campagne de communication spécifique. Chaque année, il a fallu défricher de nouveaux concepts à partir de la même matrice de base. C’est devenu une sorte d’exercice de style, un événement attendu. Objectif : valoriser le donateur en lui démontrant tout le bénéfice de son acte. Grâce à lui, Grenoble Ecole de Management réussit à… La contrainte et constante de communication : que le Dauphin (représentation de l’Ecole à l’époque) soit au départ, au centre de l’action. C’est lui qui engageait l’action, qui portait le message.
Pendant quelques années, j’ai conçu ces concepts, créé des images (moi-même pour le “végétal”, puis avec l’aide de Bertrand Maclet de 3Dplus pour la montre, la poulie et le violon). Ces relations texte-image forts ont permis dans un premier temps d’énoncer le message pour la collecte, pour ensuite se décliner pour la communication de toute l’école pour l’année en cours. J’ai réalisé des affiches, bandeaux Web, stands, animations Web, annonces presse, brochures générales pour décliner chacune de ces images.
––––